La Règle du jeu
JEAN RENOIR
Avec Marcel Dalio, Nora Gregor, Jean Renoir
- 1939
- 1h55
Microphone en main, une journaliste de radio cueille à
l’atterrissage le pilote André Jurieu (Roland Toutain) qui vient
de traverser l’Atlantique. Jurieu enfreint l’implicite règle du
jeu sociale et radiophonique en interpellant « dans le poste »,
sans la nommer, la femme qu’il aime, Christine de La Chesnaye.
La traîtresse n’est pas venue l’attendre ! Le dépit de
l’aviateur se répercute à la vitesse du son dans l’hôtel particulier
des La Chesnaye où Octave (Jean Renoir) tente d’arrondir
les angles auprès de Robert, le mari (Marcel Dalio), et de
plaider la cause de Jurieu auprès de son amie Christine (Nora
Gregor) Une fois acquise l’invitation de tous à la Colinière,
le château solognot des La Chesnaye, l’imbroglio sentimental
est lancé selon l’équation chère à Renoir : trois hommes et
une femme.
Si La Règle du jeu est considéré à raison comme l’un des
plus grands films du monde toutes époques confondues, c’est
pour sa combinaison formelle inédite : un récit découpé en
blocs hétérogènes à l’intérieur duquel les plans s’enchaînent
avec une incomparable fluidité. À la multiplication des liens
entre les personnages et à l’imbrication de chaque rythme
particulier correspond une utilisation virtuose de la profondeur
de champ. Le budget exceptionnellement élevé permet
au décorateur Eugène Lourié et à son assistant Max Douy
de raccorder à merveille les vingt plans tournés en décors
naturels au château de La Ferté Saint-Aubin aux intérieurs
créés dans les studios de Joinville. Entrées et sorties de
champ tourbillonnantes, recadrages discrets s’ouvrant sur
une enfilade de portes Selon le mot de François Truffaut, on
a « l’impression d’assister à un film en cours de tournage ».
Certes, Renoir et son collaborateur Carl Koch ont écrit un
scénario, mais Renoir y laisse du jeu, par exemple en faisant
fuser, hors champ, les réflexions des invités, et en laissant
filtrer le son d’une pièce à l’autre. L’improvisation « à la
Renoir », consiste principalement à substituer une ambiance
à une certaine précision.
(Extrait du document édité par l’ADRC avec le soutien du CNC, en partenariat avec les Cahiers du Cinéma.)