La fille de nulle part

JEAN-CLAUDE BRISSEAU

Avec JEAN-CLAUDE BRISSEAU, VIRGINIE LEGEAY.

  • 2013
  • 1h31

Un professeur de mathématiques retraité recueille une jeune SDF. Dès lors, des phénomènes mystérieux se produisent… «Faire un film avec rien», voilà l’intention première de Jean-Claude Brisseau. Et effectivement, c’est un film «fauché», tournée en DV dans son propre appartement, avec une équipe extrêmement réduite.
Pourtant l’ambition narrative du réalisateur est inversement proportionnelle à ce coté home-made. Car La Fille de nulle part vise haut : mysticisme, croyances, fantômes et réincarnation. Une révolution ? Pas tant que ça, car ce que l’on retrouve accentué dans cette histoire de fantômes de poche, c’est le mystère qui planait déjà dans les précédents films du réalisateurs (Choses secrètes, A l’aventure).
Ce qui rend La Fille de nulle part aussi singulier, aussi étrange, c’est cette curieuse alliance entre un fantastique qui ne se cache pas et l’illusion d’ultra-réalisme permanent qui vient paradoxalement mettre en valeur l’émergence brutale du merveilleux en le rendant lui aussi particulièrement tangible.
Traités de la même manière que les autres éléments du récit, les mystérieux cris entendus dans le couloir et les visions érotico-mystique deviennent aussi réelles que les meubles ou les affiches de films qui tapissent l’appartement. Bien vu. Et ces scènes fantastiques contaminent en retour les scènes les plus quotidiennes : qu’un mégot se retrouve déplacé par le vent et c’est presque un gouffre d’interprétation métaphysique qui s’ouvre.
Rien d’étonnant donc que le film ait été récompensé par le jury de Locarno présidé par un certain Apichatpong Weerasethakul qui, sans aucun doute, aura reconnu dans ce récit incroyable, d’une force d’expression fantastique et d’une originalité absolue dans le paysage du cinéma français, certaines de ses propres obsessions, dont la présence des revenants dans notre vie quotidienne. Du grand Alfred Hitchcock, Brisseau, qui connaît son œuvre par cœur, a bien sûr vu et revu Vertigo, auquel on pense plusieurs fois pendant la vision hallucinée de La Fille de nulle part.

Léopard d’Or Festival de Locarno 2012

Ce film est soutenu par le Groupement National des Cinémas de Recherche (GNCR)