Zona de Aguante
ANDRE WILLIAMS Louise
- France
- VOSTF
- 1h05
« Je crois que le Metal argentin vient de la classe ouvrière. Il est né en résistance à l’exploitation. C’est une obligation pour moi, au sein du Metal, d’avoir une position critique envers cette société. Avoir des revendications sociales et accompagner les luttes en fait aussi partie. »
Estela, Manuel et Mariela vivent à Jujuy, une province du nord de d’Argentine où convergent montagnes, jungles, steppes et des déserts salins qui comptent parmi les plus importantes sources de lithium au monde. Jujuy est à la fois la province la plus pauvre, la plus indigène et la plus machiste d’Argentine. Une terre de résistance, peuplée de près de trois cents tribus autochtones qui subsistent malgré des siècles de spoliations et d’humiliations, d’ouvriers en colère et de femmes révoltées face au fléau des féminicides, trois fois plus élevé que dans le reste du pays.
Dans cette société qui les étouffent, Manuel, Mariela et Estela ont trouvé leur exutoire : le Metal. A Jujuy, le Metal a toujours été une affaire de lutte. Depuis la fin de la dictature, il est l’hymne des luttes ouvrières, l’exutoire des jeunes qui suffoquent dans une société encore très religieuse et patriarcale. Plus récemment, il a trouvé un écho chez les communautés indigènes qui se battent pour défendre les terres de leurs ancêtres face à la méga-industrie minière. En effet, la demande de lithium, métal essentiel dans la fabrication de batteries, explose avec la transition écologique en cours. Cette ruée vers « l’or blanc » attire des entreprises du monde entier : Chine, Etats-Unis, Australie, France…
Découvrez ainsi Estela, professeur de biologie à l’université de San Salvador de Jujuy et animatrice de l’émission Metal « Zona de Aguante » (Zone de résistance) qu’elle n’hésite pas à utiliser à des fins politiques. Elle soutient ainsi le groupe Behtria dans sa lutte contre le machisme de la scène Metal dont elle a aussi souffert. Elle appelle également les metalleux de la province à la rejoindre dans le combat acharné qu’elle a décidé de mener contre l’industrie minière.
Mariela est la batteuse du groupe de Black Metal Behtria. Pour elle, l’ennemi, c’est le machisme. A Palpalá, la petite ville ouvrière désolée où elle a toujours vécu, elle manifeste toutes les semaines contre les féminicides accompagnée de sa meilleure amie Gaby, chanteuse de Behtria. L’une de leurs amies a été violée par un influent organisateur de concert de la région. Pour protester contre ce machisme qui gangrène la scène Metal, elle organise un festival de Metal féministe, l’Obnoxious Fest.
De son côté, Manuel, surnommé Montyz, est le batteur de Battle Cry, un groupe de Thrash Metal culte de la province. Son objectif : faire résonner les sonorités des peuples autochtones, dont l’histoire et la culture sont pratiquement absentes des livres d’Histoire des Argentins. Pour lutter contre cet effacement, Manuel intègre au Metal de Battle Cry des instruments des communautés indigènes de la région. Dans un chant guttural qui semble venir des temps précolombiens, il raconte les épreuves qu’ont traversé les peuples autochtones de Jujuy. Manuel enseigne également à des enfants et à des handicapés mentaux à jouer les instruments des peuples indigènes.